Dématérialisation

EDI, vers une dématérialisation totale des processus ? 

 

La mise en place d’échanges de données informatisées faisait régulièrement partie des projets de refonte des systèmes d’information des clients dans le cadre de mes missions de chef de projets . C’est sur la dématérialisation des flux entre divers acteurs, par le biais de l’EDI, que je souhaiterais porter l’accent.

Comme j’ai pu le mentionner avec la dématérialisation des échanges commerciaux par fax; produire un document pdf est relativement simple mais ce type d’échange ne convient pas à toutes les structures. Certains clients souhaitent aller plus loin dans l’échange de données, plus loin dans l’interopérabilité entre leur système et ceux de leurs partenaires, c’est notamment le cas avec les centrales d’achat ou encore entre plusieurs filiales d’un même groupe, des filiales qui disposent de systèmes d’information hétérogènes : les clients souhaitent échanger les données de manière automatisée.

Avec la structuration des « référentiels produits » dans les logiciels métier et l’avènement d’Internet qui a facilité les communications et a provoqué l’ouverture des entreprises vers l’extérieur, Sage était capable d’accompagner ses clients dans leurs projets de dématérialisation totale des flux. Ses échanges de données informatisées étaient alors envisageables selon 2 modalités. Soit les formats d’échange étaient spécifiques aux structures concernées par l’échange soit les formats d’échange étaient normés.

L’échange de données informatisées à l’aide d’un message spécifique est envisageable lorsque les deux acteurs qui doivent échanger des données sont libres de choisir la structure du message qui sera échangé. Dans ce cas un cahier des charges est rédigé pour déterminer la structure des messages. Généralement ce type d’architecture peut s’envisager dans les filiales d’un même groupe. C’était le cas par exemple entre certains metteurs en marché et les structures coopératives liée à ces metteurs en marché.

NB : Afin de comprendre en détail l’EDI nous pourrons consulter l’article[1] de Norbert Paquel qui aborde l’échange de données informatisées dans le milieu médical ou bien celui d’Anne Mayere et Christine Monnoyer[2] paru dans la revue Réseaux en 1992. Pour aller plus loin l’ouvrage « XML et le développement des EDI » (Paquel & Bezaut, 2002)  trouve toute sa pertinence. Voyons pour l’heure les conséquences de la mise en place de ce type d’échanges sur la gestion de l’information.

Échange de données informatisées avec un format spécifique

Dans le schéma ci-contre, en fonction de ses besoins de commercialisation, le metteur en marché commande de la marchandise auprès de ses filiales. Une fois les commandes préparées par les filiales, celles-ci, confirment leur expédition au metteur en marché.

Dans notre exemple que se passe-t-il ?

Tout d’abord le bureau de ventes saisit dans son progiciel une commande d’achat de marchandise. Cette commande peut contenir alors plusieurs lignes, disons 3, chaque ligne doit être commandée auprès d’une filiale différente. A la validation de la commande d’achat 3 fichiers txt sont alors générés et déposés dans les dossiers des différentes filiales concernées. Une tâche planifiée exécute alors un robot d’intégration qui se charge d’importer la commande dans le système de la filiale en tant que commande de vente. Une fois la commande préparée la filiale « transforme » alors sa commande de vente en bon de livraison. A l’issue de cette étape un nouveau message est alors produit, ce message correspond à l’expédition de la marchandise. Une fois ce message intégré dans le système de l’émetteur initial (bureau de ventes) la commande d’achat est considérée comme reçue.

La simple saisie d’une commande d’achat dans le SI émetteur (bureaux de vente), sans aucune communication humaine, sans aucune production d’information dans les SI cibles, a généré 3 commandes de vente dans 3 systèmes distants différents. Quatre systèmes ont été affecté par des échanges de données informatisées successifs et tout ceci quasiment en temps réel. Voilà l’apport de l’EDI, de la dématérialisation des échanges. Une production d’information dans les systèmes cible, sans aucune intervention humaine.

L’EDI entre acteurs qui déterminent le contenu du message, comme les filiales d’un groupe, même si elle passe généralement par des tables de correspondance pour que les acteurs « se comprennent », ne pose pas de problèmes d’interopérabilité : les acteurs font le nécessaire pour que leur SI puissent se parler. Le cas est plus complexe lorsqu’un même acteur doit échanger des informations avec un grand nombre d’acteurs. C’est le cas par exemple des centrales d’achat des grandes surfaces qui échangent des informations avec des milliers de fournisseur. Comment faire pour pouvoir dialoguer avec tout le monde ? Difficile d’imaginer des milliers de messages spécifiques. Il faut dans ce cas utiliser un protocole de communication, un standard.

Promus par l’organisme mondial GS1[3] les messages ORDERS, DESADV et INVOICE reposant sur le langage EDIFACT permettent depuis les années 2000 des échanges normés entre les différents acteurs de la chaine logistique. Il s’agit de messages au format XML permettant de gérer respectivement les commandes les bons de livraison et les factures. Les messages normés permettent de communiquer avec tous les acteurs capables de recevoir ce type de message. Par ailleurs l’utilisation des codes EAN permet une interopérabilité totale. Plus de table de correspondance à maintenir : il suffit que chaque article dans le référentiel dispose de son code EAN.

La dématérialisation et l’automatisation des flux est désormais totale. Les N systèmes distants concernés par les échanges communiquent entre eux de façons automatiques. Plus un seul document n’est nécessaire pour gérer les échanges commerciaux. Les documents y compris numériques disparaissent, toute l’information est stockée dans les progiciels métiers. Notons cependant que l’objectif de l’EDI n’est pas avant tout la suppression du document. L’objectif de l’EDI est la production, le transfert et l’intégration automatique d’informations entre plusieurs systèmes. En allant à l’essentiel nous pouvons dire que l’objectif de l’EDI est de supprimer les saisies répétitives, une information saisie dans un système est exportée et intégrée dans le(s) système(s) cible(s), et non le document. C’est la raison pour laquelle par exemple il ne suffit pas d’échanger, via le message INVOICE, les factures avec son partenaire pour être conforme. Il faut un échange de document (contrainte réglementaire) des échanges qui sont gérés par les tiers de confiance (Thibaut, 2004)

L’EDI accélère les échanges, les fiabilise certes mais en même temps ce procédé chamboule le cycle de vie de l’information, son archivage, elle impacte les schémas de validation de l’information. Il s’agit de plus en plus d’un dialogue entre systèmes et dans de nombreux cas l’information est partagée sans qu’aucun document ne soit émis. Dans le cas de l’EDI l’échange repose encore sur des exports et imports de fichiers informatiques, le document numérisé au maximum. Mais aujourd’hui l’EDI est progressivement remplacée par des webservices, aboutissement de l’EDI, ou dialogue direct entre bases de données.  L’EDI en particulier et la dématérialisation en général transfère progressivement des compétences vers la DSI sans que les DSI ne soient formés à ces nouveaux métiers. Archivistique, Science ou Technique[4]?  Finalement cela n’a pas beaucoup d’importance dans le contexte professionnel car quoi qu’il en soit la gestion des archives constitue à minima un champ de compétences, des compétences maitrisées par des professionnels formés à ces tâches : des archivistes.

Il ne suffit pas de faire en sorte que l’information soit produite et circule automatiquement pour gérer l’information. Il ne suffit pas de sauvegarder une base de données pour archiver un document. Un document a un cycle de vie, un cycle de vie qui ne semble pas toujours maitrisé avec la dématérialisation des processus.


[1] https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-du-numerique-2001-2-page-57.htm

[2] http://www.persee.fr/doc/reso_0751-7971_1992_num_10_54_2003

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/GS1

[4] https://aedaa.fr/2015/01/4-la-recherche-en-archivistique-et-les-sciences-de-linformation/

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